MTM King, RD Matson and TJ DeVries (2021):
Animal Welfare 2021, 30: 25-38; https://doi.org/10.7120/09627286.30.1.025
Introduction
Que ce soit tout simplement par passion pour les vaches ou pour rendre la production plus efficace : Le bien-être des animaux était la première priorité d'une enquête menée auprès des producteurs laitiers canadiens. Si les animaux ne vont pas bien, c'est une source de stress et d'anxiété. Exploiter une ferme est l'un des métiers les plus exigeants au monde, non seulement sur le plan physique, mais aussi sur le plan psychologique. Il a été démontré que les agriculteurs souffrent davantage de dépressions, de burn-outs et de suicides que les personnes exerçant des professions similaires. En outre, ce groupe professionnel présente une résilience émotionnelle plus faible que la norme de la société.
Insertion Wikipedia : La résilience (du latin resilire : rebondir, rebondir, ne pas adhérer), également appelée adaptabilité, est le processus par lequel les personnes réagissent aux problèmes et aux changements en adaptant leur comportement.
On pense qu'il existe un lien étroit entre le bien-être des vaches et celui des personnes qui s'en occupent. Cela a conduit à l'approche "One Welfare", parallèlement au concept "One Health" désormais bien connu. Cette approche "décrit les interactions entre le bien-être des animaux, le bien-être humain et l'environnement physique et social" (Pinillos 2018). Cette idée est particulièrement pertinente pour les animaux domestiqués. On peut citer comme exemple les agriculteurs qui tombent dans la dépression, l'alcool et les problèmes sociaux après avoir été dénoncés pour des infractions à la protection des animaux. Inversement, il a également été démontré que les agriculteurs ayant des problèmes économiques et psychologiques ont le plus grand risque d'être dénoncés pour négligence envers les animaux.
L'attention est actuellement fortement concentrée sur le bien-être des animaux et le point de vue des agriculteurs n'est souvent pas assez bien représenté. Pourtant, ce sont eux qui s'occupent des animaux au quotidien et qui ont donc l'influence la plus directe sur leur bien-être.
L'hypothèse de l'étude était que les scores de meilleure santé mentale des agriculteurs/trices pouvaient être associés à un meilleur bien-être animal.
Matériel et méthodes
L'étude s'est limitée à 28 fermes laitières équipées de robots de traite en Ontario. Les fermes ont été visitées afin d'obtenir une vue d'ensemble de la gestion et de l'infrastructure (construction des étables, etc.). La même personne a évalué la condition corporelle (échelle de 1 à 5) et les boiteries (également de 1 à 5) de 30 vaches à la fois. Six mois avant la visite, les données de production laitière de l'exploitation avaient déjà commencé à être évaluées. Les chefs d'exploitation ont en outre rempli un questionnaire sur leur état mental, déjà validé par d'autres études, avec les sections stress, résilience et anxiété/dépression.
Des variables catégorielles telles que le sexe, le milieu social (travail principalement effectué seul ou partagé), le groupe d'âge et l'alimentation par un automate ou à la main en ont découlé. L'alimentation manuelle était définie comme le travail avec un tracteur (mélangeuse), l'alimentation automatique entrait en jeu lorsque, par exemple, un robot était utilisé.
En outre, il y avait de nombreuses variables continues telles que le nombre de vaches en lactation, la production laitière, le nombre de cellules, la teneur en protéines et en matières grasses, le pourcentage de vaches sous-conditionnées, la prévalence des vaches boiteuses, etc.
Les différentes variables ont été mises en relation individuellement avec le stress, l'anxiété, la dépression et la résilience, mais aussi dans un modèle multivariable. Ce dernier a l'avantage de prendre en compte les structures d'association et de dépendance entre les variables.
Résultats et discussion
Il est intéressant d'examiner les résultats individuels des différentes variables. Par exemple, la teneur en protéines du lait semble avoir tendance à être plus élevée lorsque les agriculteurs vont bien ; pour la dépression et l'anxiété, le lien est même statistiquement significatif dans le modèle multivariable. Dans ce calcul, seules quelques corrélations significatives sont encore filtrées. Ainsi, on peut dire que le niveau de stress et d'anxiété augmente lorsque les boiteries sont beaucoup plus fortes (ou inversement : les boiteries sont plus nombreuses chez le paysan stressé) et qu'une alimentation automatique était associée à moins de stress, d'anxiété et de dépression, ainsi qu'à une plus grande résilience. Le travail partagé a également eu un effet positif sur l'anxiété et la dépression. En général, les femmes avaient tendance à être plus mentalement chargées que les hommes, mais seules huit femmes ont participé au total. Le groupe d'âge n'a jamais été significatif dans le modèle, les comparaisons individuelles ont montré des tendances : le groupe le plus âgé (45-64 ans) était plus enclin au stress, moins anxieux, plus enclin à la dépression et plus résilient que les 30-44 ans, mais moins résilient que les 18-29 ans.
On gagne plus d'argent avec des vaches en bonne santé, ce qui entraîne moins de soucis financiers. Une gestion calme des vaches entraîne moins de mouvements brusques et donc moins de boiteries. Ainsi, de nombreux facteurs s'influencent mutuellement et il est souvent difficile de savoir ce qui est arrivé en premier.
Les influences environnementales jouent également un rôle : des études ont ainsi montré que les pesticides influencent la santé mentale des agriculteurs dans les pays en développement, mais aussi dans les pays modernes. En Australie en particulier, il a été démontré que la variabilité du climat avait un effet important.
Les agriculteurs sont largement d'accord pour dire que les robots de traite ont amélioré la qualité de vie. L'étude continue de montrer le potentiel de l'alimentation automatisée.
Comme les fermes étudiées étaient déjà automatisées à l'aide de robots de traite, il s'agissait déjà d'une sélection positive. On peut en outre supposer que les agriculteurs disposant de plus de temps participent plus facilement à une telle étude. Toutefois, la motivation pourrait être plus grande chez les personnes qui sont elles-mêmes concernées par les problèmes.
L'étude n'a pas évalué l'hygiène dans l'étable ou chez les vaches et la santé physique des participants n'était pas non plus connue. Les auteurs considèrent ce travail comme une étude pilote exploratoire dans un domaine qui devrait être davantage exploré.